Maurice Benayoun –
World Skin, un safari photo au pays de la guerre,
1997.
World
Skin est une installation vidéo-projeté en 3D (avec des
lunettes), qui représente une guerre (avec des immeubles démolis,
des chars d'assaut, des combats, des soldats blessés, des tirs
d'artillerie etc.) en images fixes. Elle est projetée sur un seul
« écran » ou plusieurs (cela comprend les murs, parfois
même le sol et le plafond). Une personne tient une manette qui
permet le déplacement dans l'oeuvre. Des appareils photos sont mis à
disposition et reliés à des ordinateurs afin que chaque spectateur
puisse prendre des photographies de l'oeuvre tout en s'y déplaçant,
cependant chaque photographie transforme l'espace ciblé en espace
blanc, qui ne retrouve sa couleur d'origine qu'à l'entrée du
nouveau groupe de visiteurs.
Ce
« safari au pays de la guerre » nous propose une
traversée d'un champ de bataille tel un safari dans les savanes
d'Afrique : nous sommes immergés dans cet environnement
dangereux, alors que nous sommes totalement protégés, nous pouvons
le visiter, l'observer, le prendre en photo, en sachant qu'il ne nous
arrivera rien, alors qu'il s'agit d'un des lieux les plus horrible
qui soit. Le fait que les couleurs disparaissent montre toute la
violence du geste, « prendre une photo » se traduisant
par « shoot » en anglais, qui signifie également
« tirer », nous pouvons imaginer l'appareil photo comme
une arme, médiatique par exemple, car les médias sont là pour nous
dire ce qui se passe, qu'ils vrai ou non, nous pouvons rarement
vérifier leurs informations, donc nous sommes presque forcés de les
croire, même des photos peuvent être trafiquées ; cela peut
aussi être une arme contre des personnes, par exemple les
personnalités qui sont sans arrêt harcelées par tous les
photographes. D'un point de vue culturel, la photographie peut avoir
de très graves conséquences : dans certains pays, la
photographie était très mal vu car prendre quelqu'un en photo
signifiait lui voler son âme,(ce qui pourrait s'apparenter à
l'espace blanc après la prise d'une photo dans l'oeuvre), ce qui
montre à quel point ces appareils peuvent être violents.
Nous
pouvons voir dans cet œuvre une critique des jeux-vidéos, c'est sur
ce point que je vais me concentrer. Les producteurs de jeux-vidéos,
pour intéresser leur publique, n'hésitent pas à créer des jeux
sur des contextes violents (fin du monde, chaos, conflits minimes,
guerres). Cependant, contrairement à cet œuvre, les jeux-vidéos ne
cherchent pas à recréer exactement l'ambiance des conflits, surtout
au niveau des sons : cela pourrait créer un malaise tel chez
les joueurs qu'ils ne chercheraient pas à continuer (ce qui n'est
plus vrai aujourd'hui). Cet œuvre ne cherche donc pas à cacher ce
qui pourrait déranger le visiteur, mais montre bien ce qui était,
comme un témoignage.
Pour
continuer de parler des jeux-vidéos, je vais amener une vision plus
personnelle, étant moi-même joueur, c'est une des raisons qui m'a
poussé à choisir cet œuvre. Tout d'abord, je trouve ce dispositif
bien pensé : montrer aux spectateurs une scène passée grâce
à un dispositif 3D qui rappelle les films, les jeux-vidéos, et qui
nous rappelle également que ces loisirs ne cherchent pas à être
vraisemblants, contrairement à cet œuvre. Les premiers jeux-vidéo
nous montraient des hommes qui, lorsqu'ils mourraient, criaient un
peu (ou pas du tout) puis disparaissaient sans aucun réalisme,
cependant, plus les années passent, et plus les jeux tentent de
s'approcher de la réalité, au niveau sonore, visuel, ou au niveau
des interactions. Les jeux-vidéo, comme cet œuvre, nous amènent
dans un contexte dont on connaît l'histoire (une guerre mondiale par
exemple), mais aucun des deux ne nous montrent des hommes avec leurs
familles, seulement des soldats qui sont là pour se battre, et qui
vont certainement mourir. Cependant, les jeux-vidéo nous disent que
ces soldats veulent être au combat et qu'ils vont mourir
virtuellement grâce à nous (oui, « grâce à nous »),
tandis que cet œuvre nous laisse penser que ces soldats ont chez eux
une femme et des enfants, et qu'ils vont probablement mourir ici et
tout perdre (sans parler des conséquences pour leur famille), à
cause d'une décision qui a été prise sans leur consentement.
Depuis que j'ai étudié cet œuvre, ma vision des personnages dans
les jeux-vidéo à changer, je me suis même dit parfois que je ne
devrais pas tuer tous les gardes par exemple, je ne m'étais pourtant
jamais posé la question de l'identité des personnages dans les
jeux : un garde et un garde, un ennemi restera un ennemi, car
c'est ce qu'on nous présente dans ces jeux. Je pense donc que cet
œuvre est une bonne idée pour nous rappeler que la guerre n'est à
la base pas un jeu, mais quelque chose de violent, avec des individus
qui sont là car ils obéissent aux ordres, et qui vont certainement
laisser une famille derrière eux, et qu'ils ne vont pas tuer des
hommes et mourir par plaisir.
Référence
Rebecca
Allen, Coexistance, 2001.
Installation
interactive connectant deux personnes par ordinateurs, chacune
portant un casque-lunettes leur montrant leur environnement ainsi que
des éléments virtuels. Interaction sensorielles comprenant le
toucher, la respiration, qui interagit avec l'autre personne, et qui
mélange au final la présence humaine, les formes virtuelles et
l'espace.
Coexistance
est une installation interactive en duo. Les deux personnes possèdent
un casque-lunettes et une manette, tout cela relié à un ordinateur.
Les lunettes leur permettent de voir la pièce dans laquelle ils sont
ainsi que tout ce qui s'y trouve. Suivant les interactions avec la
manette, le regard de la personne (si elle regarde un mur, par terre,
la personne en face d'elle), la respiration également, apparaissent
alors des éléments interactifs directement dans les lunettes, qui
se transforment selon ces mêmes conditions. Cela prend donc en
compte la présence de l'humain, l'espace, et les formes virtuelles.
Langumier Mathieu, L2, 02/12/2012
(la date ayant été modifié pour regrouper les deux exposés).
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