"Or, pour le numérique, il n'y a pas d'art, ni même de formes sensibles propres à un matériau ou à un instrument. Le numérique opère non pas sur du "n'importe quoi", mais sur du "moins que rien"."

Edmond Couchot et Norbert Hilliaire, L'art numérique, Paris, Flammarion, 2003

11 décembre 2012

Sorin (Pierrick), Les réveils, 1988



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Support: Video.
Production: Pierrick Sorin. 
Packaging: sans
Présence de date: 1988.
Présence de signature: Oui
Visibilité sur internet: https://www.youtube.com/watch?v=mjdssddnBXc 
Condition de diffusion et d'exposition: exposé au musée. 
Langue d'origine: français.

Présentation :

Les réveils de Pierrick Sorin est un film super 8 de 5 minute, dans lequel on voit Pierrick Sorin lui même qui se filme tous les matins au moment où il se réveille. Il est fatigué et promet de se coucher tôt. Il y a 28 plans différents. Le fait qu'il soit tourné en super 8 une notion du film de famille est ajoutée, l'image est de moins bonne qualité et les mouvements sont moins précis. "Le comique lorsqu'il ne se limite pas à des soubresauts intempestifs, dissimule un gouffre." Pierre Giquel. Je me suis alors demandé en quoi le travail de Pierrick Sorin est en fait en quelque sorte un film autobiographique.  

Le principe d'auto-filmage pourrait amener à penser qu'il s'agit d'un narcissisme mais bien au contraire il s'agit d'auto dérision. Il se pose en idiot mais se rôle est en fait celui qui le délivre de tous les rôles, comme une façon de se libérer d'une société qui dicte les comportements. Cette pratique de l'autodérision devient une façon de se maintenir en vie, de protester, de se moquer des valeurs du monde adulte. Jean Marc Huitorel dit de Pierrick Sorin : "Solitaire, Sorin, mais paradoxalement, pas narcissique pour lui même plutôt narcissique collectif, de notre narcissisme à tous. En effet, le principe d'auto-filmage permet une identification du spectateur qui s’opère même quelques fois à nos dépens. Dans cette vidéo, le fait qu'il soit tourné en super 8 ajoute une certaine idée d'autobiographie. Mais aussi il se modèle et se prend comme un objet comme dans l'autobiographie où la personne se présente elle même, se modèle à sa façon. Cela me fait penser au travail de Noah Kalina qui s'est filmé pendant 12 ans tous les jours. 
Mais ce principe d'humour qui se dégage un mal aise chez l'artiste, il se présente sous son pire état peut être pour se cacher derrière cette image de comique. Il connait bien le spectateur et anticipe nos réactions, il sait que le rire peut servir pour nous cacher et lui se cache notamment par ce système.  Il nous prend à témoin en dépliant ses frustrations, ses erreurs ordinaires. Il autorise par le rire que s'exprime le défendu, on espère en savoir plus, dans cette vidéo, mais Sorin jubile et nous laisse pantois. Finalement une relation de l'ordre de l'intime se crée entre lui et nous, il nous fait rentré au plus prés de son quotidien. 
Mais Pierrick Sorin fait passer ses idées à travers son travail notamment sa critique de la société. La caméra devient comme un miroir, miroir d'une génération mais aussi de lui même. Il montre le repli, la désespérance, la solitude. Pour Sorin le comique n'exclut pas le pathétique. Le fait que ces oeuvre se retrouvent au musée devient une critique de ce lieu social, puisque dans ce lieu les comportements sont soustraits aux lois du silence et de la bienséance. Le monde de l'art pour Sorin est un monde élitiste, on peut lié ces idées à celle de Jean Dubuffet était un artiste délibérément opposé aux formes et usages d'une sphère qu'il voyait moribonde.  On peut aussi faire écho au mouvement Fluxus dans ces idées. Sorin a notamment effectué une action où il a collé des fausses "crottes de nez" sur des oeuvre d'art reconnus. 

Au final, on peut dire que l'oeuvre de Pierrick Sorin semble quelque chose de simple et de l'ordre du comique mais cela semble cacher beaucoup d'indices sur la personne de Pierrick Sorin. Il joue avec le spectateur, critique de la société, et où le comique semble être un bon moyen pour faire passer des idées. 

Gaëlle Chevalier (2012-2013)

























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